Projet de loi ALUR : un texte qui favorise une fois encore les riches

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Adopté en première lecture à l’Assemblée nationale le 17 septembre, le projet de loi ALUR (Accès au Logement et Urbanisme et Rénové) de la ministre du logement Cécile Duflot passe maintenant l’étape du Sénat.

Le projet de loi ALUR prévoit le transfert obligatoire de la compétence urbanisme aux intercommunalités via la création d'un PLUI (plan local d'urbanisme intégrateur). Un tel bouleversement suscite, à juste titre, l'inquiétude des villes. De fait, elles vont être dépossédées d'un des seuls leviers d’aménagement qu'il leur reste. Bon nombre de maires ne se sentent plus souverains chez eux. Et c’est à bon droit ! Les élu-e-s du Parti de Gauche ne sauraient agréer à une réforme qui éloigne encore plus les élus et les politiques publiques des citoyens. La commune est et doit rester le lieu d'apprentissage et d'exercice de la démocratie locale. Pour autant, le PG s'accorde à penser que les regroupements intercommunaux, sur la base de projets partagés, notamment urbanistiques, sont nécessaires à un aménagement du territoire cohérent. C'est une idée complètement opposée à l'acte III de la décentralisation et la Modernisation de l'Action Publique (MAP), engagés par l'actuel gouvernement, deux réformes visant à déposséder les communes de toute souveraineté.

La deuxième mesure phare touche l'encadrement des loyers. Dans les 28 agglomérations de plus de 50 000 habitants, où le marché de l'immobilier est tendu, les loyers ne pourront excéder 20% du loyer médian (les logements aux caractéristiques exceptionnelles mis à part). Le but étant de d’empêcher la hausse des prix à la relocation, et de faire baisser d’un quart le montant des loyers. Cette disposition devrait concerner 70% du parc locatif. Mais les conséquences vont être désastreuses. Si l'effet premier sera de baisser les loyers élevés, occupés par les ménages aisés, la mesure entraînera la hausse des loyers en dessous du loyer médian. Enfin, la régulation autorise de fait les propriétaires à augmenter de 20% les loyers jusqu'à atteindre la limite du plafonnement. Bref, les résultats sont clairement défavorables aux classes moyennes et populaires.

Le troisième volet concerne la garantie universelle des loyers (GUL). C'est une protection des bailleurs en cas d'impayés. Ce dispositif sera géré par un établissement public, financé à parité par les propriétaires et les locataires, à hauteur de 2% du loyer. L'objectif est de libérer des logements vacants, en partant du principe que nombre de propriétaires ne louent pas, de peur des impayés.
La Ministre du logement estime à 500 millions d'euros les fonds nécessaires à la création de cet établissement public. Les assureurs, prompts à y voir un appel à la déresponsabilisation des locataires, tablent plutôt sur 500 millions à un milliard, estimant que cette garantie pourrait faire augmenter les risques d’impayés.
Dans le même temps, une commission de coordination des actions sera créée dans chaque département afin de prévenir les expulsions locatives. Elle délivrera avis et recommandations. La gauche par l’Exemple est rétive à cette mesure, car c’est prendre le problème du logement dans le mauvais sens !
En cette période de réduction des déficits, l'Etat coupe dans les dépenses publiques et augmente les impôts, ayant pour effet d'affaiblir les services publics et d'entraver fortement le pouvoir d'achat des ménages. Or Cécile Duflot veut créer un nouvel établissement public qui, dans ce contexte, va être un gouffre financier pour l'Etat, qui sera probablement garant en dernière instance de la gestion de cette GUL.
La solution est donc plus globale, et doit passer par véritable plan de construction de logements sociaux. Il est nécessaire de lutter contre la précarisation des familles relançant l’économie, baissant les impôts injustes comme la TVA, en rendant la progressivité de l’impôt sur le revenu, en augmentant le SMIC... C’est à ces conditions que la part des salaires dédiée au loyer baissera. Dans une telle configuration, la GUL pourrait être financée par les bailleurs, qui se protègeraient eux-mêmes avec une garantie de dernière instance, à moindre coûts.

Un certain nombre d'autres éléments figurent dans le projet ALUR. Les plus importants sont ceux relatifs à l'encadrement de la profession et des pratiques dans l’immobilier. Le texte prévoit notamment la création d’un conseil supérieur de la gestion immobilière, une formation minimale obligatoire, un code déontologique et une carte professionnelle seront instaurés. Si la mesure profite aux agences immobilières, et non aux particuliers, l'encadrement de la profession reste une avancée pour pallier aux abus. En ce qui concerne les pratiques, les "marchands de liste" devront dorénavant détenir pleinement les biens figurant sur leurs listes, afin que des logements déjà loués n'y figurent plus. Certains actes des syndics seront forfaitisés et un compte séparé par copropriété devra être mis en place, afin de lutter contre de mauvaises pratiques.

Pour répondre au problème des logements indignes et des marchands de sommeil, la ministre du logement prévoit d'interdire l'achat de biens immobiliers à ceux qui sont condamnés, de contraindre les bailleurs à payer une astreinte et de suspendre l'allocation logement tant que les travaux ne sont pas réalisés. Enfin, la loi créera vraisemblablement les statuts pour l'habitat participatif, qui se développe aujourd'hui: les coopératives d'habitat et les sociétés d'autopromotion. Ce paquet de mesures va dans le bon sens, puisqu'il permet à la fois d'enrayer des mauvaises pratiques, ou au moins d'user de dispositifs légaux pour les réduire, et de créer un véritable secteur délimité.

Si les intentions peuvent apparaître louables, ce projet de loi ALUR est insuffisant et les effets peuvent être désastreux pour les catégories populaires dans un contexte de paupérisation.

Les élu-e-s du Parti de Gauche revendiquent un vrai projet de loi sur le logement dans lequel, aux côtés des associations de défense du logement, nous réclamons :

> L'encadrement à la baisse des loyers privés : 20% sous le loyer moyen de référence

> Le gel des loyers en HLM, le relèvement des APL et des aides à la pierre pour leur construction

> Le renforcement des droits des locataires et des résidents de foyers à un logement stable, décent et accessible, l'interdiction des congés ventes, des congés frauduleux

> L'arrêt des expulsions sans relogement et la pénalisation des expulsions illégales

> Le respect et le renforcement des lois pour les mal logés et les sans logis : Loi DALO, Droit à l'hébergement, loi de réquisition, logement indécent ou indigne

> L'abrogation de la loi Boutin et de toutes les mesures de marchandisation des HLM

> La restitution des 60 milliards d'euros du livret A offerts par les gouvernements aux banques sans contrepartie depuis 2009

> le rétablissement du 1% logement, afin de financer annuellement un million de mise aux normes thermiques et 150 000 logements sociaux promis par François Hollande.